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" Le contraste peut paraître étonnant. Depuis un an, l’argent public coule à flots pour compenser les pertes des secteurs marchands liées à la pandémie de Covid-19. Plus de 215 milliards d’euros ont été dépensés pour répondre au « quoi qu’il en coûte » décrété en mars 2020 par Emmanuel Macron et, à chaque nouveau « tour de vis », de nouveaux crédits sont ouverts. Et de l’autre, on assiste à une magnifique foire aux idées pour « rembourser », « réduire » ou « maîtriser » la dette publique."
" une proposition conjointe LREM-LR devrait venir distinguer les « bonnes » dépenses (l’investissement), des « mauvaises » (le fonctionnement, les traitements des fonctionnaires et les dépenses sociales), avec pour ambition de comprimer les deuxièmes. "
"Comment comprendre une telle dichotomie ? Pile, l’argent public est déversé, même au-delà des besoins (c’est d’ailleurs la raison pour laquelle il existe un surplus d’épargne qui correspond à ces transferts non dépensés). Face, on tire sonnette d’alarme sur sonnette d’alarme et on promet le retour à la discipline budgétaire comme si l’argent manquait…"
"Ce que montre cette note, c’est que la volonté de reprendre ce récit sur la dette publique est bien une tentative de poursuivre la domination néolibérale."
"Cantonnement et contrôle des dépenses sont donc des rhétoriques profondément conservatrices visant à transférer le poids de la dette publique vers les citoyens et, particulièrement, vers la solidarité nationale. Le schéma est toujours le même : utiliser l’argument de la confiance vis-à-vis de l’extérieur pour « neutraliser » le problème de la dette en le sortant du domaine du choix politique. Dès lors, c’est au politique de faire avec cette contrainte. La logique est donc celle de discipliner le politique, quelle que soit sa « couleur » en faisant de la dette une contrainte permanente et intouchable. De sorte que le citoyen et le politique lui-même n’y voient plus une donnée sur laquelle il a prise, mais une puissance externe à laquelle chacun doit se soumettre. C’est l’effet autoréalisateur : la dette est sacralisée par des choix politiques s’appuyant sur des « experts » et elle devient sacrée pour tout le monde."
" la démarche de l’actuel exécutif est donc très proche de celles de leurs prédécesseurs conservateurs. Utiliser la crédibilité vis-à-vis des créanciers, de l’Allemagne, jouer sur le faux parallèle avec les ménages (« une dette, ça se rembourse »), utiliser des comités d’experts… Tout cela vise à construire ce récit politique et à imposer cet agenda."
" En conclusion, les auteurs expliquent que l’histoire financière « nous enseigne qu’il existe une panoplie de mesures pour faire face au cas où la dette publique poserait problème : la restructurer partiellement ou entièrement, imposer le patrimoine, faire de la répression financière, laisser courir l’inflation, etc. ». Pour les auteurs, « il n’existe pas de critère technique pour identifier la meilleure méthode car aucune option n’est neutre, chacune crée des gagnants et des perdants ». Autrement dit, la question de la dette est toujours politique. Et devrait donc être traitée comme telle. Et c’est bien pour cela qu’il faut verrouiller le débat."