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" La croissance n’est pas le développement. La première est quantitative alors que le second est qualitatif."
Intéressante citation : Comme le dit Sénèque, « le pauvre n’est pas celui qui a peu, mais celui qui veut toujours plus »
" les partisans de la décroissance ont raison d’affirmer que « la décroissance n’est pas la récession ». La société qu’ils entendent bâtir n’est pas juste l’inverse de la société de croissance, mais une société fondée sur autre vision du monde. Aussi, la question n’est pas de décroître économiquement en laissant le reste des institutions inchangé, mais de tout remettre à plat. C’est pour cette raison que de nombreux auteurs de la décroissance préfèrent se qualifier d’a-croissants ou de post-croissants.
Pourtant, la question qui vient immédiatement après avoir rejeté, non la croissance, mais bien l’idéologie qui sous-tend la croissance, est de savoir par quoi la remplacer et sur quoi refonder une nouvelle société. Et puis comment, concrètement, changer l’imaginaire ? "
Je colle ici la conclusion de cet article, conclusion tout à fait capitale :
Les théories de la décroissance sont marquées par une grande diversité ; certaines approches ne sont pas a priori contradictoires avec un discours rationnel. Après tout, il n’est pas déraisonnable de penser que le système économique actuel, mû par le capitalisme néolibéral, est insoutenable. Aussi, à l’heure de l’anthropocène, proposer de rompre avec cette logique pour préserver les grands équilibres de la biosphère doit être envisagé très sérieusement. Mais cette réflexion, légitime, ne doit pas être un prétexte pour défendre une vision passéiste et obscurantiste du monde. Or, une partie des théoriciens de la décroissance proposent une telle vision.
Le problème est que le discours sur la décroissance proposé au grand public, tel celui développé par l’économiste Timothé Parrique par exemple, pose un voile discret sur les conceptions philosophiques antimodernistes de nombre de théoriciens de la décroissance. Peut-on citer des auteurs comme Ellul, Illich ou Latouche en faisant systématiquement l’impasse sur les aspects réactionnaires de leur pensée ? Peut-on concilier une vision progressiste et humaniste de la société avec une pensée qui renie explicitement une partie de l’héritage des Lumières ?
Les militants de la décroissance devraient engager un sérieux débat avec eux-mêmes et choisir clairement un camp. Soit ils se rangent du côté de la Raison, du progrès et de la science, soit ils privilégient la spiritualité, le relativisme sociétal et la sensibilité subjective. Mais vouloir faire la synthèse de ces deux visions au nom de la cause militante sans en dévoiler les contradictions relève tout simplement de l’imposture.
Brillant, mérite d'être écouté.
La page Wikipédia d'Arthur Keller : https://fr.wikipedia.org/wiki/Arthur_Keller
voir aussi : http://shaarli.mydjey.eu/shaare/3vR5mQ
Intéressant, le monsieur a fait une thèse sur le sujet
Il met en avant le terme de post-croissance
décroissance ≠ récession
Son site https://timotheeparrique.com/
" Benjamin Coriat : La réflexion sur la sobriété est en cours. Pour un certain nombre d’acteurs, à commencer par les pouvoirs publics, l’idée de la sobriété se résume à l’idée de « faire un peu moins » : un peu moins de chauffage, un peu moins de douches longues, un peu moins de circulation en centre-ville. Mais au-delà de la crise énergétique que nous traversons, il y a la question de la crise climatique. Et elles ont toutes les deux la même origine : on ne peut plus consommer autant de matières premières qu’auparavant. À mon sens, il ne faudrait donc pas seulement parler de la sobriété comme un modèle « un peu moins » mais comme un tout nouveau modèle économique. Car tôt ou tard, c’est ça qui reviendra au premier plan. "
"Le concept de sobriété auquel je pense, ce n’est pas « faire moins » mais faire autrement ! Produire autrement, consommer autrement, se déplacer autrement, construire autrement, s’alimenter autrement. C’est ce qui me permet de ne pas entrer dans le débat sur la décroissance. Je ne suis pas pour la croissance à tout prix, mais je ne suis pas non plus décroissant. Prôner le « moins » sans autre forme de procès ne peut conduire qu’à la récession et à des crises aggravées. Il s’agit d’une impasse. Si on ne fait pas de la sobriété « autrement », et qu’on se contente du « moins », avec un mode de croissance qui suppose une consommation permanente, élargie, accélérée, on va droit dans le mur."
« Tant que vous nommerez, vous chefs d'entreprise, croissance le fait de raser un espace gorgé de vie pour le remplacer par une plateforme commerciale nous n'aurons pas commencé à réfléchir sérieusement »
Discours pertinent et courageux d'Aurélien Barrau à l'université du Medef. Bien que ce soit nécessaire, je suis toutefois assez pessimiste sur l'impact que le discours aura sur le patronat.
C'est comme faire un discours devant un parterre de toxicomane en leur expliquant les méfaits de la drogue sur l'être humain. Peu arrêteront suite à cela.
" Dans un ouvrage récemment paru [De quoi avons-nous vraiment besoin ? ], les Économistes atterrés posent une question qui peut sembler triviale mais est essentielle : de quoi avons-nous vraiment besoin ? Poser la question, c’est déjà changer la logique de l’économie. Entretien avec la coordinatrice de l’ouvrage, Mireille Bruyère. "
" Il s’agit de prendre la question économique à l’envers de la manière dont elle est d’ordinaire posée : partir des besoins pour produire l’essentiel, plutôt que de produire d’abord pour créer ensuite des besoins utiles à la production.
Ce petit livre riche est donc un moyen utile de sortir de l’enfermement intellectuel actuel, dans lequel l’entreprise, le marché et le profit sont considérés comme le point de départ de toute solution, alors même qu’ils sont au cœur du problème.
"
"Réfléchir aux besoins, c’est d’abord remettre en cause les méthodes de l’économie orthodoxe qui estime que la répartition des ressources est réglée par le marché. À l’inverse, la méthode adoptée dans ce livre est de soumettre l’ensemble du système économique au préalable des besoins."
"Bien sûr, nous restons des économistes, nous ne sommes pas devenus des anthropologues ou des sociologues. Mais si l’on veut renouveler la discipline économique face aux enjeux actuels, il nous faut partir de cette définition des besoins. Car définir les besoins, c’est aussi définir un mode productif et une organisation sociale."
"un des points communs des Économistes atterrés, c’est précisément le rejet de cette marchandisation complète de la société. Nous sommes favorables à maintenir des pans de la société en dehors du marché."
"Nous avons cherché à tout prix à éviter l’idée qui voudrait que poser la question des besoins revienne à stigmatiser des classes populaires qui ne feraient pas ce qu’il faut en termes écologiques. Cela a été le cas lors du mouvement des « gilets jaunes », où l’on a entendu qu’il fallait des politiques coercitives car ces gens ne voulaient que consommer. Notre démarche consiste au contraire à dire qu’il existe un lien fort entre production et consommation, et que le sens de ce lien est l’expansion et l’accumulation générale des profits. Et, en réalité, ce que l’on observe, c’est que la hausse du pouvoir d’achat s’accompagne d’une plus forte contrainte à la consommation. Les classes les plus modestes ont de plus en plus de dépenses pré-engagées ou contraintes. Ainsi, si le pouvoir d’achat d’un ouvrier est plus important que dans les années 1960, sa capacité d’arbitrer et de choisir est beaucoup plus réduite."
Par ailleurs, sur la notion de besoin écouter :
https://www.franceculture.fr/emissions/la-grande-table-idees/de-quoi-avons-nous-vraiment-besoin
Autre livre : Razmig Keucheyan "Les besoins artificiels" (La Découverte).
Citation de Kenneth Boulding (lui-même éconmomiste).
la Décroissance ne saurait se résumer à une “sortie du capitalisme” - expression vague s’il en est. La gestion bureaucratique des moyens de production en URSS était tout aussi productiviste que la version capitaliste-libérale occidentale, et les désastres écologiques et sociaux pas moins dramatiques.
Voir aussi le livre "un projet de decroissance" http://www.projet-decroissance.net/
le vrai clivage qui fait sens est celui entre "décroissance choisie" et "récession subie"
" Le 15 avril 2020, le centre patronal, une organisation d’employeurs en Suisse, a publié un communiqué d’anthologie, dans lequel il s’inquiète que le confinement ne fasse trop apprécié la sobriété heureuse prônée par les écologistes : « Il faut éviter que certaines personnes soient tentées de s’habituer à la situation actuelle, voire de se laisser séduire par ses apparences insidieuses: beaucoup moins de circulation sur les routes, un ciel déserté par le trafic aérien, moins de bruit et d’agitation, le retour à une vie simple et à un commerce local, la fin de la société de consommation.. ".
Même si je n'aime pas le titre et que je suis pas d'accord sur tout dans la première partie, j'ai trouvé la seconde partie sur la décroissance très bonne. J'en partage pas mal d'idées.
C'est une vision de la décroissance que je qualifierais de progressiste, dans le sens où elle peut dessiner un avenir enviable (VS l'effondrement dont on entend beaucoup parler ces temps-ci). Et dans le sens où elle parle de remettre de la démocratie. Une démocratie décroissante en somme.
Je ne met pas de citations, trop de passages intéressants en seconde partie.
L'article est de Charles-Adrien Louis (“CAL”) https://twitter.com/charles_adrien?lang=fr
Très bon.
[Edit]
Copie : http://mydjey.eu/media/video/didier-super-gilets-jaunes.mp4
« Il faut bien comprendre que nous vivons depuis plus de cinquante ans dans une société qui a assimilé le bonheur au bien-être, et le bien-être au toujours-plus de biens possédés. Cet idéal correspond à celui des Trente Glorieuses, à l’augmentation du pouvoir d’achat, à la démocratisation des appareils électroménagers et des voitures. Il correspond à ce que Pier Paolo Pasolini appelait « le nouveau pouvoir », au « totalitarisme de la consommation » dont il disait dans ses Ecrits corsaires « qu’il est le plus violent et le plus totalitaire qu’il y ait eu, car il change la nature des gens, il entre au plus profond des consciences ».
[...], entre en contradiction avec les ressources réelles, aussi bien financières que naturelles, et il a conduit à la situation que nous vivons actuellement. L’injonction à la consommation se heurte au mur du porte-monnaie et produit la frustration dont l’« affaire Nutella » est un symptôme.
[...]
Dans un cadre plus ou moins feutré, la violente injonction à consommer touche toutes les strates de la population. »
Wow !
Il aura fallut attendre 2018, pour que le Monde publie une définition à peu prêt exacte de la société de (sur)consommation dans laquelle on vit.
A quand sur TF1 ? +_+