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" L’État a-t-il bradé les concessions autoroutières ? Comment peut-il réagir désormais pour préserver ses intérêts et celui des usagers ? "
Concernant la (potentielle) future autoroute Toulouse/Castres.
Quelques explications qui démontrent notamment qu'une voie rapide entre deux villes favorise économiquement toujours la plus grosse des deux villes.
Les arguments pro #A69 sont en gros : 1. (El classico) Les chinois polluent, pourquoi pas nous. 2. la volonté locale . 3. La sécurité 4. le dévpt éco et urbain de Castres. Les 4 arguments sont démontables mais laissez moi vous parler du 4ème qui relève de ma spécialité.
Le fantasme de l’autoroute qui sauverait l’économie d’une ville, en permettant de s’y rendre et d’en partir plus rapidement, est tenace. Pourtant bcp de villes moyennes de la taille de Castres sont reliées par autoroute et sont pourtant notoirement en dévitalisation, alors quoi ?
Comme toujours tout dépend de la définition des termes du problème.
Derrière le « développement » certains pensent centre-ville quand d’autres voient des potentiels grandes zones d’activités, commerciales, lotissement en périphérie.
Et ces 2 types de dévpt sont, dans les villes moyennes, assez largement antithétiques et même concurrents.
Une large documentation nous renseigne sur le lien intrinsèque entre créations d’infrastructures routières et libération de foncier de périphérie.
Càd qu’avec la création d’une autoroute, ce sont d’abord les fonciers proches de celle-ci qui vont être revalorisés, et donc ceux loin du centre, complètement dédiés à la mobilité motorisée (càd proche des échangeurs « diffuseurs » comme on les appelle), et donc les lotissements.
Cela crée des boucles complètes de vie indépendantes du centre et dépendantes de la voiture.
Schématiquement à Castres et ses environs, selon le tracé prévu à l’enquête publique de l’A69 ça favorisera forcément la frange ouest de la ville.
La concurrence des territoires jouant à plein, ces fonciers sont en compétition entre périphéries et centres (au détriment des derniers) mais aussi entre différentes villes et bourgs. Sur l’A69 cela favorise donc aussi toutes les villes proches des « diffuseurs » du projet.
On parle ici de Puylaurens, Saïx, Soual, toutes déjà contournées par la RN26, notamment au profit de leur relation à la ville centre qui ne sera plus alors Castres mais bien Toulouse.
Il s’agit des déplacements pendulaires et hebdomadaires liés par ex au télétravail mais sur un mode motorisé, c’est à dire dans tous les cas au détriment de leurs petits centres-villes respectifs et encore davantage de celui de Castres.
Ceux-ci, de manière systématique, verront leur taux de vacance commerciale augmenter, abandonnés de leurs attractivités intrinsèques.
En prévision de ça, dans le cas du tracé de l’A69, la communauté de communes Sor et Agout (Puylaurens, Saïx, Soual) s’est déjà un peu préparé avec un Plan Local d’urbanisme Intercommunal qui anticipe relativement ce phénomène, mais quid de castres et de son PLU de 2012 ?
Souhaite-t-on vraiment une frange ouest de Castres avec une vague de construction au profit d’employés tertiaires toulousains, télétravailleurs, à 2h aller-retour en voiture de leur emploi, acteurs à mi-temps de la vie locale ?
L’A69 favorisera donc effectivement le développement de certaines zones, mais sur un mode où la distance domicile-travail s’allonge, et tandis que les centres villes (ou bourgs) sont dévitalisés. Est ce là l’urbanisme et l’aménagement du territoire que l’on peut souhaiter?
La réponse est évidemment non, mais alors que faire ?
Eh bien beaucoup de choses sont possibles. Rappelons ici que l’A69 coûte environ 500M€ auxquels s’ajoutent 20M€ de subventions annuelles qui viendront compenser le fait qu’elle ne générera pas assez de trafic.
Avec cet argent on peut financer le plus grand plan français de revitalisation de centre-ville (pour une ville de la taille de Castres, les plans sur lesquels je travaille sont à environ 100M€ intégrant des espaces publics, de la rénovation bâtie, commerciale),
mais on peut aussi financer la rénovation lourde de l’infra ferroviaire et en augmenter la cadence, on peut financer des kms de pistes cyclables, et si on veut quelque chose de tapageur, on doit sans doute pouvoir aller chercher un projet bling bling type « train à sustentation »
On peut, en tout cas, faire mieux pour tout le territoire que l’A69, miroir aux alouettes qui dévitalisera autant les centres-villes et bourgs, qu’elle coutera un argent qui manquera pour les bons projets.
Pour aller plus loin : https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2023/06/19/l-a69-toulouse-castres-est-elle-justifiee-les-arguments-pour-ou-contre-ce-projet-d-autoroute_6178231_4355770.html
" Quant aux divers moyens de financement de ce plan, Élisabeth Borne souhaite « mettre à contribution les secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre comme l’aérien et ceux qui dégagent des profits importants comme les sociétés d’autoroutes » "
alors ça ... j'attends de voir ...
https://corporate.vinci-autoroutes.com/fr/presentation/lautoroute-est-vous
"L' autoroute est à vous".
Cynisme absolu de Vinci affiché au bord des autoroutes !
L'autoroute est à nous ... mais c'est Vinci qu'on paie pour l'emprunter. Et visiblement ça lui réussit bien à Vinci :
Vinci tire la moitié de ses 4,3 milliards de bénéfices de ses rentables autoroutes – Libération
https://www.liberation.fr/economie/transports/vinci-tire-la-moitie-de-ses-43-milliards-de-benefice-de-ses-tres-rentables-autoroutes-20230209_HLOZBFQS3RE4PNJ6NHMD6TUTCI/
"si elle contribue à plus de la moitié des bénéfices de sa maison-mère, son chiffre d’affaires (6 milliards) ne correspond pourtant qu’à quelque 10 % de celui du groupe."
Alors que les péages augmentent à nouveau, le rapport de l’Inspection générale des finances, révélé par « Le Canard enchaîné », remet en lumière la rente exorbitante des autoroutes concédées au privé. Une situation héritée des choix faits en 2015 notamment par Emmanuel Macron et Élisabeth Borne.
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C’est une privatisation qui ne passe pas. Et plus le temps passe, plus il y a consensus pour dénoncer cette vente des autoroutes au privé. Mais cette fois, c’est l’Inspection générale des finances qui le dit : l’accaparement de monopoles physiques essentiels par le privé, sans contrôle et sans régulation, a conduit à la constitution de rentes indues.
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Depuis 2017, les sociétés concessionnaires ont obtenu un plafonnement de certaines taxes d’occupation du territoire, une baisse de l’impôt sur les sociétés, des aides et des subventions de toute nature pour les accompagner, sans parler des déductions de tous les frais financiers qui les ont amenées à se décapitaliser pendant des années afin de minorer leurs impôts .
Le Canard a mis la palme sur un rapport de l'Autorité de régulation des transports pas encore divulgué : les concessionnaires d'autoroutes roulent toujours plus sur l'or !
Non content de privatiser les routes, les gestionnaires privées ne veulent plus s'embêter à gérer les stations de péages.
Ici une route nationale va devenir payante. Tu passes comme tu veux sans payer, mais si tu paies pas ton passage le gestionnaire a accès au fichier des plaques d'immatriculation et t'envoie une amende
Selon des sources parlementaires concordantes et des sources proches du pouvoir, des tractations ont bel et bien lieu actuellement dans les sommets de l’État pour savoir s’il faut exclure ou non un allongement des durées de concessions, et si allongement il y a, selon quelles modalités.
Tout va bien
Avant le dos des automobilistes c'est sur le dos du citoyen que les sociétés font des profits colossaux.
À peine inauguré, déjà saturé. Le périphérique parisien, 1973.
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CICE (cadeaux aux sociétés sous forme de crédit d’impôts) perçu par les Sociétés d'Autoroute de 2014 à 2017 : 41.500.000 €
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Pendant ce temps là elles suppriment 1340 emplois.
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Toujours pendant ce temps là : 3.300.000.000 € de dividendes sont versés aux actionnaires.
(source : CGT transports)
Si on avait pas privatisé les autoroutes ces 3 milliards permettraient de faire pas mal de choses positives pour le pays.
Les discours sur l’austérité que devraient accepter les citoyens ne sont pas entendable au vu de choses comme exposées au dessus.
On parle ici d'autoroutes donc un secteur où la concurrence n'est pas possible. Même problème du coté de l'aéroport de Paris, sauf qu'on peut encore agir pour qu'il ne soit pas privatisé : http://shaarli.mydjey.eu/?rcL9IQ
« D’après la Cour des comptes, les sociétés autoroutières profiteraient de la faiblesse de l’État pour allonger la durée de leurs concessions... et engranger de jolis profits en finançant les travaux voulus par les pouvoirs publics.
L’État perdrait-il les pédales face aux sociétés autoroutières ? Oui, à en croire la juridiction financière qui a rendu public ce jeudi 18 avril un référ »
Il existe une autoroute entre Dijon et Beaune. Aujourd'hui si tu veux pas jongler entre les différences de vitesses sur les routes départementales, tu prends l’autoroute en payant au passage une taxe à APPR/Eiffage ou encore à Vinci.
Je suspect par ailleurs que la généralisation du 80km (dont je suis pour pour d'autres raisons, mais là n'est pas le sujet), ne sois pas dû à des questions de sécurité routière (moins de morts sur les routes) mais à un lobbying intense des concessionnaires autoroutiers privés.
Lorsque les gens sont emmerdés (limitations de vitesses, radars etc.) sur les départementales ils finissent d’accepter de payer les autoroutes.
Au passage c'est un scandale (dont s'empareront j'espère les gilets jaunes) que d'avoir privatisé les autoroutes alors qu'elles avaient été payées par les français et qu'elles étaient une manne financière pour l'État (voir : http://shaarli.mydjey.eu/?_B4wHw)
« En 1967, la mairie et le président Pompidou souhaitent construire 8 autouroutes en plein coeur de Paris, détruisant ainsi des milliers de logements, le canal Saint-Martin et plusieurs grandes places de la ville »
« Pour résumer, l'augmentation des péages a servi avant tout à rémunérer les actionnaires.
La question posée, in fine, est celle du pourquoi de la privatisation.
Dominique de Villepin n'a-t-il pas sacrifié le long terme -des autoroutes rentables pour l'Etat, y compris sans dérive des tarifs-, au profit de recettes de privatisation à court terme?
Au passage, les banquiers d'affaires ont eu droit à d'importantes commissions. Mais il n'est plus question, là, d'intérêt général. »
Cette affaire résume de façon on ne peut plus clair comment fonctionne les États modernes (au cas où quelqu'un ne l'aurait pas encore compris) ...
A ce sujet voir la très bonne vidéo d'Osons Causer : http://shaarli.mydjey.eu/?yX1B8w